jeudi 23 avril 2015

Lettre ouverte à mes députés et sénateurs


Lettre ouverte à mes députés et sénateurs


Mesdames, Messieurs,

Depuis le 13 avril, la loi sur le renseignement est examinée à l’Assemblée Nationale en première lecture. Quelques jours avant, un ensemble d’acteurs français issus du numériques - des fleurons européens et mondiaux, la CNIL - ou non – Amnesty International, juges anti-terroristes, se sont levés contre cette loi qui présente des aspects liberticides préjudiciables contre les libertés individuelles des citoyens et des entreprises.

La loi prévoit l’installation de « boîtes noires » chez les opérateurs de datacenters, les hébergeurs et les opérateurs télécoms qui auront pour objectifs d’analyser en temps réel toutes les « méta données » (informations décrivant un contenu) qui transitent et d’alerter « par un algorithme tenu secret » lorsque ces « méta données » décriront un contenu portant sur les domaines de « l'indépendance nationale, de l'intégrité du territoire et de la défense nationale » et de « la prévention du terrorisme », mais également des « intérêts majeurs de la politique étrangère », ainsi que de la « prévention des atteintes à la forme républicaine des institutions » et de « la criminalité et de la délinquance organisées ». Ces formulations floues pouvant déclencher les alertes, la variété des raisons pouvant être invoquées sont de nature à déclencher l’inquiétude de beaucoup de citoyens et d’entreprises sur les restrictions possibles de leurs libertés, notamment d’expression et de communication. 

L’impact de cette loi et de ces boîtes noires va bien au-delà de la simple analyse des communications. Des entreprises n’ayant plus confiance dans la confidentialité de leurs données et de leurs communications, de grands noms d’acteurs du numérique gérant ces données, comme OVH, expriment également le changement de leur stratégie de développement en créant de nouveaux datacenters hors de France, la privant ainsi de nombreux emplois hautement qualifiés dans le domaine du numérique. Cette loi est de nature à saper tous les efforts entrepris pour développer le numérique, accompagner les entreprises dans leur transition numérique et rendre nos territoires attractifs pour affronter cette 3ème révolution industrielle du numérique. L’impact économique et social sera très important, tant pour les prestataires numériques que pour leurs clients. L’innovation et la créativité se trouveraient de fait réprimées de par l’auto censure des citoyens et des entreprises, se sachant « écoutés ». Elle affaiblira de manière forte toute l’économie numérique émergente, de manière nationale comme locale, et nous rendra de fait inexistant à l'international.

En tant que citoyen, cette loi est de nature à permettre à tout pouvoir en place, l’actuel comme ses successeurs, de pouvoir utiliser les capacités « d’écoute électronique » à toute fin, notamment par l’amplitude trop large d’interprétation des domaines pouvant déclencher ces « écoutes ». J’ai également été interpellé d’apprendre que seuls 25 députés sur 30 présents sur un total de 577 députés ont voté pour cette loi en première lecture. Pour un texte aussi important, impactant de manière aussi essentielle nos libertés individuelles comme collectives, je trouve scandaleux et inquiétant qu’aussi peu de représentants du peuple aient été présents pour en débattre et voter en toute représentativité.

Je vous sollicite donc, en tant que représentants du peuple dans nos deux assemblées, pour que vous fassiez opposition à cette loi afin qu’elle ne soit pas adoptée. Cela permettra de préserver la liberté des entrepreneurs et des citoyens. Sans cette loi, la France sera assurée d’entrer de plain-pied dans l’ère numérique et entrepreneuriale.

Partageant avec vous les valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité de notre République, je vous prie d’agréer, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, l’expression de mes salutations distinguées.