dimanche 30 août 2015

Pourquoi je ne suis pas d'accord avec Reid Hoffman


Comme je l'ai eu dit à plusieurs reprises, j'ai beau lire et relire cette citation, j'ai beau comprendre son message, je n'arrive pas à être d'accord.

Tout d'abord, pour moi, entreprendre n'est pas un "saut de l'ange". Ce n'est pas cet espèce de chute libre, sans possibilité de revenir en arrière, de "pari" s'il y a de l'eau en bas (ou pas) et qu'on fait tout pour éviter cette chute libre. Entreprendre c'est plutôt un chemin que l'on construit au fur et à mesure, avec un brouillard à quelques pas devant, mais entre ce brouillard et nous il y a toujours une marge de manœuvre, des choix possibles, différents chemins possibles, que l'on construit/choisit de prendre, tout en ayant la possibilité de voir "ce qu'il y a au loin", la direction générale là où on veut aller. Et parfois, il y a de belles montées, difficiles, tendues, qui réclament de l'effort. Mais aussi de belles descentes ou de beaux plateaux pour voir le paysage. Et puis, entreprendre, c’est aussi avoir le choix de s’arrêter. Or la chute évoquée énonce plutôt que si tu ne construis pas ton avion, tu fais SPLASH à l’arrivée et après, plus rien. Ce qui n’est pas vrai. (oui, il y a des suicides chez les entrepreneurs et je suis de ceux que cela rend affreusement triste, croyez moi. Mais tout projet entrepreneurial qui n’aboutit pas ne mène pas systématiquement au suicide !). Combien ont arrêté pour redevenir salarié ? Et c’est là que je ne suis pas d’accord, sur cette image du « hors la réussite, point de salut ».

Ensuite, Entreprendre ce n'est pas risquer comme on risque au casino, notamment tout perdre. Dans l’image fournie, cela suppose que l’on soit « tombé » avec tout ce qu’il faut pour construire l’avion. Or c’est rarement le cas. En démarrant, nous avons rarement, si ce n’est jamais tout ce dont nous avons besoin pour avoir une entreprise qui marche.  Entreprendre c'est au contraire contrôler son risque, avancer pas à pas, au fur et à mesure des rencontres et de son lot d'événements sur la base de ce que l'on a à chaque moment (sachant que cette base évolue à chaque rencontre ou événement). Bien sûr il y a des choses pas marrantes, des événements que l'on jugera plus ou moins bien. Mais d'autres arrivent aussi qui sont bonnes. Mais chacun de ces événements peut être exploité, utilisé. Et chaque rencontre nous apporte de nouvelles ressources et de nouveaux éléments sur lesquels on peut avancer.

Enfin, cette phrase présente l’entrepreneuriat d’un point de vue qui n’est pas vrai,  celui de l’entrepreneur qui réussit tout seul, self-made-(wo)man, super-héros et qui lutte contre les vilains éléments qui veulent absolument l’abattre (que l’image de l’avion entretient également).Ce n’est pas vrai. A tous mes amis et confrères entrepreneurs, dites-moi, sur ce chemin, n’avez-vous pas fait de belles rencontres ? Des rencontres qui vous changent la vie, qui vous aident. De celles vous montrent d’autres possibilités de chemin, qui vous donnent des coups de pouce, … C’est avec elles qu’on avance un peu plus loin. Comme celles qui nous montrent ce que l’on n’a pas envie d’être, de faire ou des directions qu’on n’a pas envie de suivre. Sans ces rencontres, en seriez-vous là où vous en êtes aujourd’hui ?

Pour terminer je dirai que sa présentation ne donne pas envie d’entreprendre. Elle ne fait pas la promotion de l’entrepreneuriat. Elle semble le réserver à une élite. Qui présenterait des caractéristiques (qui sont vaguement caractérisées) particulières. Et qu’il n’y aurait donc qu’une seule voie pour entreprendre.

Je comprends donc cette phrase, dans ce qu’elle présente. Je reconnais que ce que Reid Hoffman a fait est assez hors du commun. Mais je ne suis pas d’accord avec cette phrase. Elle évoque pour moi quelque chose d’extrêmement narcissique et égocentrique. Elle fait fi de toutes celles et tous ceux qui l’ont accompagné, lui ont donné les moyens de faire ce qu’il a fait, de continuer de le faire. En exprimant l’entrepreneuriat ainsi, je trouve qu’il se met en avant en marchant sur la tête des autres. Alors que pour moi, entreprendre, c’est choisir un chemin en essayant d’avancer avec les autres car sans eux, on n’y arrive pas.

samedi 22 août 2015

Un excellent cas de pivot d'enteprise

Dans cet article, Fujifilm Shifts Focus to Stem Cells and Ebola Drugs - Bloomberg Business, on découvre un excellent cas du principe de pivot d'entreprise. D'une grosse entreprise. 


Afin d'assurer la pérennité de ce corps social qu'est Fujifilm, son CEO Shigetaka Komori a décidé d'analyser et comprendre quelles étaient les compétences développées en interne pour fabriquer les composants et couches des films photos. Puis, d'utiliser ces compétences pour fabriquer d'autres produits, comme par exemple les soins de peau et les films qui maintiennent les écrans LCD. 



Son plus gros challenge a été de créer des "groupes d'innovation". Une de ses scientifiques qui a développé des molécules pour préserver les photos a été assignée à un nouveau métier à son retour de maternité pour appliquer ces technologies à la peau. Le collagène étant un composant des films photographiques et de la peau, en deux ans, elle a développé une ligne de beauté à partir des molécules utilisées pour empêcher les photos de pâlir.




Il lui aura fallu une dizaine d'années pour pivoter. Imaginez pour vous, TPE/PME, qui n'avez pas cette taille, le temps que cela peut vous prendre. C'est exactement cela qu'il vous faut faire, aujourd'hui, pour embrasser la transition numérique pour ne pas être balayée demain : analysez quelles sont vos compétences réelles (qui ne sont pas les produits que vous fabriquez ni l'entreprise que vous n'êtes pas) et regardez comment vous pouvez introduire le numérique soit dans vos moyens soit dans vos produits pour assurer la pérennité de votre entreprise. Si vous devez changer de métier ou de produits, alors, ainsi soit-il. Qu'est-il plus important ? Le métier ou la "société" humaine qu'est l'entreprise ? Qu'est-ce qui peut aller le plus loin ?